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49. 14 Paramètres sur lesquels s’appuyer pour travailler l’interprétation en danse


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Voilà un sujet à nouveau souvent mystique. Peu de monde en parle, mais pourtant, il y a vraiment des outils pour y arriver.

Ce n'est, à nouveau, pas un don du ciel, comme la fameuse grâce des danseurs !

1. Mais de quoi on parle ?

Un peu de vocabulaire

🤓 "Interprétation", "État de danse", "Présence". Tous ces mots désignent la même chose. C'est manière qu'a le ou la danseur•se de bouger qui fait qu'on le regarde, qu'il nous captive, qu'il nous raconte quelque chose sans dire un mot.

✨ C'est cette façon de danser le même mouvement qu'un•e autre personne ou qu'une autre fois mais un peu différemment. Et du coup, c'est ce qui différencie la danse de toutes les autres pratiques corporelles : yoga, sport, fitness, et mouvement en général. C'est ce qui fait aussi que la danse demande une certaines concentration, même pour "réaliser" (enfin, danser), des mouvements qu'on peut faire pourtant dans la vie de tous les jours.

🤔 "Danser technicien" et "danseur interprète". Ces mots vous parlent ? Ils sont un peu caricaturaux. En gros la danseuse technicienne, c'est celle qui se concentre sur la technique de son mouvement, la performance, la réalisation. La danseuse interprète, c'est celle qui danse au sens où elle interprète ses mouvements. Et justement, la différence c'est vraiment le focus.

Du coup, c'est là que se situe souvent toute la poésie de la danse.


Raviver la nécessité intérieure des actes moteurs donne à la présence du danseur sur scène sa dimension poétique.

Les automatismes acquis par la technique risquent de donner un aspect mécanique à l'expressivité du sujet.

La capacité de rejouer avec le mouvement, comme pour la première fois, ce retour à l'enfance restitue le cheminement biologique, l'ancrage organique de notre identité

Nathalie Schulmann


2. Les erreurs fréquentes

Faire une montagne de l'interprétation

🙈 Oui, les grand•e•s artistes, les pros, font tout un travail d'interprétation, trouve du sens dans le moidnre geste. Et c'est très bien, c'est leur travail. Mais non, il ne faut pas défendre un projet artistique ni savoir déceler les 36000 signification d'un geste pour pouvoir l'interpréter. L'interprétation peut être simple. Et d'ailleurs, plus tôt vous commencerez à être dans l'interprétation, plus tôt vous savourerez la danse et vous trouverez d'autres espaces d'interprétation.

Donc n'attendez pas d'avoir un certain niveau, une bonne forme ou une révélation artistique pour interpréter et vivre la danse qu'on vous transmet !

😆 Et à l'inverse, pas la peine de surinterpréter l'interprétation. Non, la danse n'est pas du théâtre. L'interprétation en danse est un travail fin et subtil fait de sensations et de connexion (et même au théâtre desfois c'est trop et c'est pas agréable), mais c'est très concret et simple. Pas la peine de chercher à vouloir mettre le drame d'une tragédie grecque dans votre chorégraphie pour l'interpréter. 

Vouloir tout faire en même temps

🙋‍♀️ Vous avez une tendance à être (ou avoir été) plutôt bonne élève ?
Si oui, attention, je vous vois venir tout de suite. Au prochain cours de danse que vous prenez, vous allez vouloir vous appuyer d'un coup sur les 14 paramètres (et au passage vous en vouloir car vous en aurez oublié la moitié haha).

Alors, qu'on soit bien au clair :

  • Il est difficile de se rappeler les 14 et moi-même, j'ai un peu fouillé pour vous en trouver 14
  • L'interprétation est quelque chose de subtil, on n'y va pas avec ses gros sabots haha
  • La bienveillance commence avec soi même et encore plus dans l'interprétation et la poésie !
  • Certains paramètres se prêtent plus à des mouvements lents, d'autres le contraire, etc.
  • Tous les paramètres ne vous parleront pas et c'est ok. On a tou•te•s des affinités et des réticences. Ce travail renvoie aussi à nos schémas et construction corporels, donc un peu d'indulgence. Vous ne serez pas moins une artiste, une danseuse si le paramètre n°36 ne vous parle pas du tout !
  • Ce n'est pas une recette mais des paramètres sur lesquelles S'APPUYER. S'aider quoi.
  • Pour rappel, en danse, on n'apprend pas en auto-flagellant son cerveau mais en faisant et en tâtonnant. Alors, tâtonnez, testez, et laissez le temps aux infos de rentrer une par une, avec tout le temps dont elles ont besoin.
  • La méthode que je vous recommande : testez un cours de danse avec un paramètre en focus. Refaites cela avec un autre paramètre. Amusez-vous ainsi à en tester plusieurs, un par un. Quand vous êtes plus à l'aise, rajoutez des paramètres, des couches de sensations et de perceptions. Les sensations c'est un peu comme un nuage de mots. Si vous voulez tout lire d'un coup, vous n'allez rien comprendre. Mais si vous lâcher prise, vous allez d'abord être attirée par un mot, vous allez prendre le temps de le lire, puis un autre, etc.

Lire les articles de blog liés

Chronique 39 : " Ce qui se cache derrière la grâce des danseuses "

Chronique 26 : "Danse et sport, quelle différence ?"


3. Les 14 paramètres sur lesquels s'appuyer

C'est parti pour la liste à la Prévert à picorer selon les sensibilités et les envies !

1) Le regard

👀 Où il est ? Comment il est ? Qu'est ce que je regarde ? Regard doux, dur, diffus, précis, intérieur, qui accompagne, qui soutient, qui exprime. Voilà les palettes par lesquelles vous pouvez passer. 

⚠️ Le regard anti interprétation : celui qui réfléchit, qui cherche, qui vérifie. Oubliez que vous pouvez faire des erreurs et regardez vraiment. Regardez votre danse, votre corps, votre environnement, votre public, et jouez avec. 

2) La respiration

🙄 Danser en apnée c'est pas bon.

C'est pas bon pour les muscles, c'est pas bon pour l'endurance. Et c'est pas bon pour l'interprétation. La respiration est source d'expressivité alors vivez-là à fond et laissez-la permettre certains mouvement, autorisez certains mouvements à modifier votre respiration. La respiration est par ailleurs une vraie clef pour savourer sa danse. Un délice !

3) Les sensations du corps en mouvement

🍃  Autrement appelé "la perception kinesthésique". C'est considéré comme un des sens méconnu. C'est vraiment la sensation du corps qui bouge. Il s'agit donc, un peu comme une méditation, de se concentrer sur les sensations du corps : si je bouge un bras, je ressens quoi, quelle conséquence ça a sur le reste de mon corps, mes appuis... 

4) Les qualités du mouvement

🥰 Voilà un paramètre de la danse dont je parle régulièrement sur les réseaux sociaux ! Selon moi, c'est ce qui fait le relief de la danse, sa variété, sa richesse. On ne fait pas que bouger, on est traversée par des matières de corps qui rendent le mouvement expressif. On est donc ici directement dans la qualité. 

Quelques exemples : Se mouvoir avec un corps hyper moi vidé de tout énergie. Au contraire, tenter de bouger en imaginant qu'on est bloquée, empêchée en permanence. Danser comme si on planait sur la Lune, sans aucune gravité. Vous sentez que cela nous amène à des états de corps bien différents ? 

5) La sensation du temps

⏳ Comment passe le temps ? Combien de temps prend ce geste ? Est-ce qu'il est rapide ou lent ? Comment je retiens le temps de ce mouvement suspendu, de cet étirement, pour retenir le temps qui passe ? 

Se concentrer sur le temps, c'est savourer le temps qui passe et la durée de chaque geste, lent ou rapide. C'est donner à voir le temps de la transformation du corps et du mouvement. C'est à la fois simple, subtil, et très beau ! ✨

6) L'espace autour de soi

💡 Êtes-vous conscient•e de l'espace autour de vous ? Le sol sur lequel vous évoluez, la chaleur du sol, l'écart entre vous et le mur qui se rétrécit ou qui gonfle et qui vous pousse, le plafond qui vous attire...

Voilà à nouveau un terrain de jeu infini, à la fois abstrait et subtil et pourtant très concret, très ancré, et qui nous relie à l'espace autour de nous. C'est aussi une manière de danser "les pieds sur terre" et dans l'espace où vous êtes, que ce soit un studio, chez vous, la scène ou dehors. C'est beau, non ? 

7) Les autres

👯‍♀️ La danse est à la fois un sport individuel et collectif. Interpréter ça peut être aussi danser en travaillant sa conscience du groupe, se relier au tempo des autres, construire une écoute collective qui fait qu'on danse à l'unisson, ou pas, mais ensemble. Qu'on crée une œuvre commune. 

Voilà une technique d'interprétation très liée à l'écoute pas seulement auditive, mais l'écoute et l'attention aux autres. 

8) L'histoire, l'image décalée

📚 Voilà souvent ce à quoi on pense quand on parle d'interprétation : tout le sens caché des mouvements. Alors, oui, parfois c'est vrai, mais souvent, l'image vient après le mouvement. On ne fait que rarement (enfin pour ma part) un mouvement de "soulever un drap" et on le danse. Mais on chorégraphie un geste et on l'interprète : "c'est comme si je soulevais un drap". D'ailleurs, on n'est pas dans le mime, on vient pas faire "faire des actions comme si", mais on va s'aider d'images pour développer des mouvements. 

Du coup, cette image vient préciser le mouvement, le renforcer, lui donner du relief et "du sens". Mais, et heureusement, on ne fait pas ça tout le temps et pour tous les mouvements, ça serait un sacré travail. Ça reste un outil bien pratique pour donner du sens au mouvement, tout en restant ludique et accessible. À vous après d'imaginer ce que vous voulez 😉

9) Les tonus corporels

💪 Un focus sur vos muscles et leur état de contraction. Il s'agit là de percevoir si vos muscles sont contractés ou pas. Contractés à fond ou juste un peu. Tous vos muscles sont contracté ou le bas du corps est contracté, et le haut relâché.

Comment on fait le même mouvement en variant ce tonus musculaire ? Qu'est ce que ça change ? Ou je peux alors trouver la force, l'élan pour réaliser le mouvement ? Et si je change juste un peu, en graduant la contraction du muscle...  Un terrain de jeu qui demande et qui construit une perception fine de ses muscles pour arriver notamment au "mouvement juste", efficace et "racontant" ce qu'on veut qu'il raconte. 

C'est assez lié à la respiration et aux qualités, mais c'est un peu différent. 

10) "Le sens haptique"

😮 Voilà un sens que j'ai découvert à l'occasion de mes recherches pour cette chronique de danse. C'est le sens du toucher en mouvement, celui qui nous permet de percevoir les volumes et qui "prolonge" notre corps. Il est beaucoup utilisé en danse contact où on travaille la sensation de l'autre danseur pour un travail de meneur/suiveur. 

En danse, il permet d'être plus présent à cette notion d'espace (paramètre n°6), mais aussi de travailler sur cette notion de mouvement continu, qui se prolonge au delà de nous extrémités, de nos corps. C'est notre capacité à projeter le mouvement au delà de nous. C'est notamment ça qui donne parfois la sensation que les danseurs sont très grands ou ont des bras qui déploient loin !

11) Les 5 sens

Là, je ne vous apprends rien, vous les connaissez : la vue (cf paramètre n°1), l'ouïe, l'odorat, le goût, le toucher (cf paramètre n°10). Au delà du goût qu'il peut être difficile de mobiliser en danse (quoique certains l'ont fait hein mais bon, c'est vraiment que personnellement ça me dépasse un peu 😂), les autres sont facilement mobilisables, rien que par les organes sensoriels qui y sont reliés. 

👂 Danser en développant l'écoute de la musique, des autres, du bruit de son corps et de sa respiration. Déclencher le mouvement par l'oreille curieuse. Globalement, ça peut paraître un peu plus difficile mais mettre ses sens en éveil, c'est aussi une belle manière d'être bien présente au mouvements dansé : chercher à danser en se concentrant sur la chaleur du sol, le toucher de nos appuis...

12) Les émotions

🥺 J'ai gardé un des plus évidents pour la fin, mais oui, les émotions sont bien un paramètre d'interprétation. Les traverser en dansant est très riche ! Mais pour que "ça marche", encore faut-il que ça soit authentique, ce qui demande une vraie concentration, du temps et un bel espace. Sinon, le risque c'est de "surjouer" ou de tomber dans "le pathos" et l'émotion faciles qui peuvent sonner faux. Interpréter des émotions c'est un énorme travail pas évident pour être juste car il est très exposant et demande de donner beaucoup de soi, mais c'est un beau chemin à parcourir. 

13) Se laisser traverser

😏 Et si on faisait comme si nous n'étions pas à l'origine des mouvements ?

Quelqu'un qui nous tire, la gravité qui nous appelle, un aimant qui nous attire... Se laisser traverser est une manière (très lié aux histoire #Paramètre n°8) aussi d'interpréter en lâchant-prise. Vous n'êtes pas obligée d'être toujours aux manettes et de surintellectualiser le moindre mouvement. Laissez-vous surprendre. 

14) Façonner l'air, laisser sa trace

Enfin, je vous propose de tenter le contraire. Danser en cherchant à laisser votre trace. Votre trace dans l'air, le souvenir de votre danse. C'est un peu ici un mélange entre les notions d'espace et de temps. Et je trouve ce dernier paramètre très poétique pour ma part !

4. Petit exercice à essayer dès maintenant

L'interprétation ne requiert pas de mouvement compliqué. Je vous partage un exercice que j'avais moi-même traversé lors d'un atelier avec Christine Gérard, une chorégraphe très sensible. 

Prenez un mouvement SIMPLE avec un début et une fin. Un seul mouvement, pas une série de geste. Marcher, ou faire un cercle avec le bras, ou  jeter une jambe.. Le mouvement le plus simple marche très bien. 

Dansez-le en vous concentrant sur le paramètre n°1. 
Dansez-le à nouveau en vous concentrant sur le paramètre n°2.
Dansez-le à nouveau en vous concentrant sur le paramètre n°3.
[...]
Dansez-le à nouveau en vous concentrant sur le paramètre n°14.

👉 Pour aller plus loin, demandez à une autre personne de faire le même exercice. Puis, montrez-vous respectivement 3 interprétations de ce mouvement et observez. 

Encore il fois, il est bien possible que certains paramètres vous paraissent obscurs et ne vous apportent aucune sensation. C'est normal. C'est comme la méditation. "Vous ne sentez rien? C'est ok" haha. Parfois il faut du temps pour se connecter à ses sensations, des répétitions, de la patience. Et il y a des jours avec et des jours sans.

Enjoy !


Et surtout, dites-moi... Vous avez tenté l'expérience ?! 
Est-ce que vous vous étiez déjà posée la question de l'interprétation ? 


Marjorie Lempereur

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4 commentaires sur “49. 14 Paramètres sur lesquels s’appuyer pour travailler l’interprétation en danse”

  1. Super vos explications sur l’interprétation en danse.
    Vous m’avez ouvert l’esprit pour mieux expliquer à mes élèves.
    Merci beaucoup !

  2. Merci beaucoup ^^ Ce n’est pas comme au théâtre en général c’est vrai, par contre votre approche à un grand nombre de liens avec la pédagogie de création théâtrale de Jacques Lecoq. Celle à laquelle moi et mon metteur en scène nous sommes formés en premier et qui reste l’influence la plus forte dans nos créations. Notamment l’idée du corps mimeur, pas mimeur dans le sens mimétisme mais dans l’idée d’observer les mouvements de la nature pour les intégrer chacun.e avec sa propre sensibilité. Par exemple nous n’allons pas mimer l’arbre mais intégrer son ancrage dans l’espace , le haut du corps peut quant à lui être comme poussé par le vent, en jouant sur l’intensité du vent (brise, tempête, etc…) comme les branches sont poussées par le vent. En démarrant toujours la création par de l’impro sur une musique ou par rapport aux mouvements que nous percevons dans un tableau ou dans le silence avec juste une contrainte du type danser avec des mouvements de telle couleur, des mouvements rouges, des mouvements bleus, etc… ou contrainte du type danser en étant la terre, en étant le feu, le bois, la rouille, une souris, un coquelicot. On commence par des mouvements agrandis à leur maximum, pour diminuer jusqu’à ce qu’ils ne soient plus perceptibles en dehors de notre corps, souvent pour trouver après un entre-deux entre agrandi au maximum et imperceptible, un mouvement justifié.

    1. Merci beaucoup pour ce complément ! J’ai travaillé un peu avec des troupes de théâtre, et oui, tout à fait, quand une approche sensible et fine du corps est intégrée au travail, on retrouve énormément de points de communs avec la danse. Au fond, au delà des disciplines, je suis convaincue que c’est une question d’approche 🙂

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